Devenir la photographie - 2015-2020

Exposition double également présentée à Plein sud, centre d’exposition en art actuel à Longueuil, du 13 mars au 24 avril 2021.

Depuis le début de sa carrière, Chuck Samuels se demande comment la photographie fonctionne et comment s’articulent les œuvres emblématiques de l’histoire de la photographie. Au début des années 1990, pour parvenir à ses fins, il s’approprie des images emblématiques de l’histoire de la photographie et du cinéma. Tout en sélectionnant des images cultes dans les archives, l’artiste épris de lui-même, dira-t-il avec humour, en est venu à se photographier et à se filmer afin d’introduire sa propre image en lieu et place du principal protagoniste figurant dans chacune de ses photographies et extraits de films. Le résultat est saisissant. Au fil du temps, en pointant l’objectif sur lui-même, « son intrusion » dans les images reconstituées est devenue le dénominateur commun de sa pratique. Avec ces autoportraits, le photographe s’insinue dans l’histoire de la photographie, voire dans la photographie elle-même. Flirtant consciemment avec l’absurde, le projet de Samuels consiste à « devenir la photographie », telle une aventure faussement narcissique, telle une conjonction du photographiant et du photographique, une démarche singulière réalisée avec finesse, érudition et humour.

Les œuvres présentées à EXPRESSION font partie d’une exposition double présentée conjointement avec Plein sud, centre d’art actuel à Longueuil, et couvrant trois décennies de la carrière de l’artiste (1990-2020). À EXPRESSION on retrouve les corpus récents de l’artiste, réalisés depuis 2015. Avec The Photographer (2015), Samuels réfléchit à sa propre place dans l’histoire de l’autoportrait photographique. Dans After (2020), il fabrique des « remakes » afin de revisiter l’art de l’appropriation. Avec On Photography (2020), il observe le rôle du critique et son autorité sur le milieu de l’art. Avec The Complete Photographer (2020), il explore le rôle du magazine de photographie.

Remerciements de l’artiste
Les corpus The Photographer et On Photography ont bénéficié du soutien du Conseil des arts et des lettres du Québec. The Photographer a été réalisé lors d’une résidence au Centre de production DAÏMÕN. On Photography, After et The Complete Photographer ont été créés lors d’une résidence à L’imprimerie, centre d’artistes. After Gordon, une œuvre d’After, a été réalisée grâce au Programme d’assistance à la production d’OBORO. L’artiste tient à remercier tous ces organismes.

Lien vers la publication.

Chuck Samuels, vidéo de l’exposition Devenir la photographie - 2015-2020 présentée à EXPRESSION, 2 min 10 s. © NousTV

(Dé)masqué.e.s

L’exposition des finissant.e.s du programme Arts visuels et médiatiques du Cégep de Saint-Hyacinthe

En ces temps de pandémie, le choix du titre (Dé)masqué.e.s est quelque peu ironique. Alors qu’aucun masque physique ne sera enlevé, les 16 étudiant.e.s dévoileront tout de même leur vrai visage. Ils se mettent à nu dans ce projet final dans lequel ils se sont investis corps et âme, sans compter leur temps. En se démasquant, ils s’interrogent sur le rôle et l’importance de l’art dans leur vie et pour la société.

Inédites, les œuvres présentées témoignent du cheminement personnel et artistique des étudiant.e.s qui partagent ainsi leur vision du monde en une variété de techniques : dessin, peinture, sculpture, installation, animation, etc. Cette exposition met en lumière leur travail acharné et leur quête de singularité à travers l’acte de création.

Vers des cycles mouvants

Une exposition présentée à EXPRESSION, Centre d’exposition de Saint-Hyacinthe et au Jardin Daniel A. Séguin.

« Quelles sont certaines des tactiques permettant de cultiver l’expérience de nous-mêmes en tant que matière animée ? »
(Jane Bennett, 2010)

La matière vit, se transforme, prolifère ; elle poursuit une trajectoire essentielle à sa vitalité. Végétaux, roches, plastiques, humains, électricité, rebuts, métaux, elle s’inscrit dans un ensemble de relations processuelles et interconnectées. Elle perdure, incessante et cyclique, qu’elle soit désirée ou importune, naturelle ou fabriquée.

La présence active de cette matière dans notre quotidien appelle à la conscience son pouvoir d’emmagasiner récits, mémoires et affects, nous obligeant, nous, êtres humains, à reconcevoir notre rôle et notre regard sur elle et à nous repositionner au cœur d’un monde en mouvance. En nous distanciant de cette conception binaire opposant vivant et non-vivant, sujet et objet, il s’agit désormais de reconnaître l’engagement de la matière et sa capacité à impacter le monde.

Cette question que pose l’autrice Jane Bennett renvoie à notre propre capacité d’agir, mais, cette fois, en tournant notre regard vers un potentiel rapport d’équité avec la force expressive des entités qui nous entourent. Comment agir nous-mêmes en tant que matière vibrante, mais, surtout, comment nous engager humblement avec cette énergie vitale qui habite les êtres non vivants ?

Kuh Del Rosario récupère et intègre choses du quotidien et matières naturelles à ses œuvres installatives, se positionnant en égale avec elles et tentant d’en dégager de nouveaux récits. Par la combinaison et l’exploration de la notion d’alchimie, elle sauve ces matériaux d’une perte probable, prolongeant en quelque sorte leur souffle.

À travers une pratique sculpturale, installative et photographique, Julie Roch-Cuerrier explore les processus de transformation de la matière, se prêtant à une observation méticuleuse du passage du temps. On y décèle une présence marquée du vert-de-gris, fruit de l’oxydation du cuivre, qui ouvre la voie à une forme spectrale de matérialisation du temps, l’artiste recyclant inlassablement ce pigment instable dans ses différents corpus.

Le travail d’Ingrid Tremblay accorde une place de choix à la trace – celle laissée par le temps, la nature, le geste sculptural, les souvenirs. Par un travail acharné et une propension pour diverses techniques de fabrication à la fois traditionnelles et contemporaines, elle met en lumière la matière comme porteuse de mythologies, autant personnelles que partagées.

En s’inscrivant dans la foulée des théories néo-matérialistes, cette exposition remet en question la relation anthropocentriste de l’humain avec la matière, et cette idée que celle-ci ne répond qu’à ses fins. Reconnaître aujourd’hui ce pouvoir actif de la matière, c’est admettre que l’entreprise humaine n’est plus l’unique dominance. L’agentivité humaine, liée à une conception inerte de la matière et qui s’est longtemps imposée sur notre écologie et nos ressources, pourrait-elle maintenant être réévaluée ? Ne pourrions-nous pas considérer un monde où vivant et non-vivant s’imbriquent respectueusement dans une écologie vitaliste ?

Vidéo de l’exposition collective Vers des cycles mouvants - Towards Moving Cycles présentée à EXPRESSION, 3 min 20 s. © NousTV

Voyager du regard, revisiter le paysage

Ivan Binet produit des œuvres photographiques depuis le début des années 1990. Il a également réalisé plus de vingt œuvres d’art public. Sa production artistique est principalement engagée envers le paysage, un genre qu’il privilégie depuis le début de sa carrière.

Au fil des corpus et des œuvres réalisés, il revisite la manière de voir et de comprendre le paysage. Il use d’astuces et de procédés dans la conception de ses œuvres afin de moduler le regard que l’observateur porte sur elles et sur le paysage qui nous environne. Il cherche aussi à laisser percevoir la dimension construite inhérente aux nombreux paysages qui s’étalent régulièrement sous nos yeux de promeneurs.

Ivan Binet est un photographe d’exploration et d’expéditions. Ce promeneur arpente les territoires, desquels il puise ses images. Il est attentif aux mouvements d’ombres et de lumières, à la luminosité variable et aux différentes couleurs de la lumière. Les mouvements des glaces, des eaux, des sols, des sédiments ou des matières le fascinent. Il s’assure de bien saisir les nuances et les richesses de chaque lieu visité. Il en est ainsi des rives du fleuve Saint-Laurent, des paysages de différentes régions du Québec, des nombreux cours d’eau et des sites industriels ou miniers qu’il explore.

À travers les œuvres présentées dans cette exposition, nous pouvons discerner et apprécier sa démarche de bricoleur de l’image et du paysage, démarche qui a évolué au fil des années et des méthodes et technologies disponibles. Par cette approche, il en vient à créer de nouveaux paysages imaginaires, mais vraisemblables, construits à partir de « prélèvements » sur le motif.

L’exposition vise à tracer un premier bilan de trente années de recherches et de réalisation d’œuvres de l’artiste. Des premiers essais et explorations photographiques adoptant une forme sculpturale, jusqu’aux œuvres photographiques plus récentes en relation avec l’histoire de la peinture et les enjeux environnementaux, l’exposition présente des œuvres des premières années à aujourd’hui et accorde une place aux projets et œuvres d’art public qu’il a conçus.

Cette exposition a été produite par la Maison Hamel-Bruneau de l’arrondissement Sainte-Foy–Sillery–Cap-Rouge de la Ville de Québec. La circulation de l’exposition est assurée par le commissaire.

Ivan Binet, vidéo de l’exposition Revisiter le paysage présentée à EXPRESSION, 4 min 08 s. © NousTV